Petites annonces, agences matrimoniales… Nous avons toujours eu besoin d’un petit coup de pouce pour trouver l’amour. Bien qu’elles soient plus populaires, éclipsant les rencontres en soirée ou dans les bars selon diverses études, et qu’elles aient allègrement bousculé notre imaginaire amoureux, les applications de rencontre n’ont pas tué l’amour. Comme l’explique la sociologue Marie Bergström, elles mettent plutôt au défi l’amour comme nous l’imaginons et changent les rouages de l’amour en pratique. Car notre conception de l’amour et les applications de rencontre se retrouvent sur l’idée que quelqu’un, quelque part, est fait pour nous. Qu’il soit question de notre âme sœur ou d’une compatibilité implacable.

Au cours des 20 dernières années, les applications de rencontre ont pris de plus en plus de place dans notre quotidien. Rencontrer son ou sa partenaire sur une application dédiée n’est plus une honte, comme c’était le cas il n’y a pas si longtemps. Aujourd’hui en France, 1 couple sur 5 s’est rencontré en ligne sur une plateforme spécifique. Mais après un essor époustouflant suite à la pandémie de Covid-19 et les confinements à répétition, on assiste à un essoufflement des applications de rencontre.

Leurs revenus dégringolent, leurs utilisateurs les ghostent… Les apps de rencontre sont dans une impasseet sont sommées de se réinventer et d’innover pour survivre. L’année dernière, la valorisation boursière du géant du dating comme Match Group, détenteur de Meetic, Tinder, Hinge et OkCupid, était de “seulement” 8 milliards de dollars contre 50 milliards de dollars en 2021. Chez la concurrence, c’est la même rengaine. Si bien que le groupe Bumble a décidé de mettre un point final à son idylle avec Fruitz, l’application de rencontre tricolore ciblant la génération Z. Les célibataires sont victimes de la dating app fatigue, las des conversations superficielles et d’un manque flagrant de connexion authentique.

Dans ce contexte compliqué, une application de rencontre réussit à tirer son épingle du jeu : Hinge. Alors que ses concurrents bataillent pour garder leurs utilisateurs, l’app de rencontre “conçue pour être supprimée” nage à contre-courant. Elle est n°1 en France et affiche une augmentation de 40% de ses utilisateurs en 2024. À l’occasion de sa présence à VivaTech il y a quelques semaines, nous avons eu le plaisir de rencontrer Justin McLeod, le PDG de Hinge, pour parler d’amour et de dating à l’ère de l’intelligence artificielle.

La confiance comme business model

Quand on lui parle de dating app fatigue, Justin McLeod en a conscience. C’est d’ailleurs pour cette raison qu’il a rebooté Hinge en 2016 et qu’il s’efforce, avec ses équipes, de lutter contre cette lassitude grandissante. Aujourd’hui, les cœurs esseulés reprochent aux apps de rencontre de les maintenir “en ligne”, de se baser sur la frustration de ne pas trouver chaussure à son pied, de pousser à l’achat pour maximiser les chances de développer une connexion significative parmi un océan infini de profils et de conversations frivoles.

Avec son slogan “conçue pour être supprimée”, Hinge leur promet de ne pas rester (trop) longtemps dans leur vie. Alors que cette mission peut sembler en contradiction avec le besoin évident de rentabilité, l’app de rencontre de Justin McLeod semble avoir trouvé la recette. En tenant cette promesse, en permettant des rencontres notables et des connexions plus profondes, les utilisateurs s’occupent de faire la publicité de Hinge. Ils en parlent à des amis qui en touchent un mot à leurs amis, qui, eux-mêmes, passent le mot à des amis d’amis de leurs amis. Le bouche-à-oreille, il n’y a rien de plus efficace.

Contrairement à des applications de streaming, Hinge n’a pas besoin de garder ses utilisateurs, elle doit encore convaincre des gens. Alors que les utilisateurs plébiscitent son efficacité, les célibataires vont être plus enclins à télécharger Hinge plutôt qu’une autre application. Ils vont même être prêts à mettre la main au portefeuille plus facilement. Tout simplement parce qu’ils ont confiance en l’application, ce qui est rare dans un secteur en perte de crédibilité.

Le business model de Hinge peut sembler contre-intuitif. Promettre aux utilisateurs une installation éphémère de l’application ne paraît pas compatible avec la rentabilité et le profit. Pourtant, c’est précisément cette promesse tenue qui fait la force de Hinge. Les chiffres parlent d’eux-mêmes. Là où les concurrents reculent, l’application de rencontre de Justin McLeod, elle, gagne du terrain.

Source : https://www.presse-citron.net/jai-rencontre-le-pdg-de-hinge-et-on-a-discute-amour-ia-et-tech/